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Cour de cassation : quels inédits retenir cette semaine ?

Social - Contrat de travail et relations individuelles
09/10/2020
Les arrêts de la Chambre sociale de la Cour de cassation à retenir parmi les non publiés du fonds de concours de la semaine du 5 octobre 2020.
 
Travail temporaire : l’entreprise de travail temporaire, qui perd sa qualité d’employeur au terme de la mission, n’est plus débitrice du montant du salaire pour la période postérieure
Selon l’article L. 1251-1 du Code du travail, le recours au travail temporaire a pour objet la mise à disposition temporaire d’un salarié par une entreprise de travail temporaire au bénéfice d’un client utilisateur pour l’exécution d’une mission. Il en résulte que l’entreprise de travail temporaire, qui perd sa qualité d’employeur au terme de la mission, n’est plus débitrice du montant du salaire pour la période postérieure, peu important la requalification du contrat de mission en contrat à durée indéterminée dans les rapports entre le salarié et l’entreprise utilisatrice. Cass. soc. 30 sept. 2020, n° 19-12.416 F-D

Convention de forfait de salaire irrégulière : quel impact sur le décompte et le paiement des heures supplémentaires et sur la rémunération ?
En présence d'une convention de forfait de salaire irrégulière, le décompte et le paiement des heures supplémentaires doit s'effectuer selon le droit commun, au regard de la durée légale hebdomadaire de 35 heures ou de la durée considérée comme équivalente.
Par ailleurs, lorsqu’il a été rémunéré sur la base du nombre d’heures stipulé dans la convention de forfait en heures reconnue irrégulière, si le salarié ne peut prétendre entre la 35 et la dernière heure de ce forfait, au paiement du salaire de base une deuxième fois, il peut prétendre aux majorations  afférentes aux heures supplémentaires, effectuées au-delà de la durée légale, dont le juge doit vérifier l'existence et le nombre. Cass. soc. 30 sept. 2020, n° 18-26.795 F-D
 
La clause de l'accord de mobilité , qui prévoyait que les propositions de mobilité pourront concerner tous les établissements de l'entreprise existant à la date de sa conclusion, était précise, peu important qu'elle ne dresse pas la liste de ces établissements. Cass. soc. 30 sept. 2020, n° 18-26.756 F-D
 
Facebook : les messages publiés doivent contenir des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs visant explicitement l’employeur
Une salariée a été licenciée pour faute grave, l'employeur lui reprochant un dénigrement de l'entreprise notamment sur une page de son compte Facebook accessible au public. Contestant son licenciement, la salariée a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes. La société fait grief à l'arrêt d’appel de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle avance, notamment, que commet une faute grave le salarié qui laisse publier sur sa page Facebook accessible à tous, des propos injurieux ou outranciers, et en toute hypothèse portant préjudice à son employeur. À tort. La cour d’appel a fait ressortir que les messages diffusés par la salariée ne contenaient pas de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs visant explicitement l’employeur. Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 19-10.123 FS-D

Baisse de la rémunération : il faut une acceptation expresse et non équivoque du salarié
Le contrat de travail ne peut être modifié qu'avec l'accord exprès du salarié, lequel ne peut résulter de son silence ou de la poursuite par lui de l’exécution du contrat de travail aux nouvelles conditions. La rémunération du salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord.
En déboutant la salariée de sa demande en paiement de rappel de salaires et congés payés, alors, d’une part, qu’elle avait constaté une baisse de la rémunération ce dont il résultait que la modification du contrat de travail nécessitait l’accord exprès de la salariée et alors, d’autre part,  qu’elle avait relevé que la salariée avait protesté postérieurement à sa prise du nouveau poste, amenant l’employeur à lui maintenir pendant les premiers mois le salaire antérieur, et que la salariée avait refusé de signer l’avenant proposé par l’employeur, ce dont elle aurait dû déduire l’absence d’acceptation expresse et non équivoque de la salariée à une telle modification de son contrat de travail, peu important la poursuite par elle du contrat de travail dans les nouvelles conditions, la cour d’appel a violé les articles L. 1132-1 du Code du travail dans sa rédaction applicable en la cause et L. 1134-1 du Code du travail. Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 19-12.283 F-D
 
Il résulte de l’article L. 2411-10 du Code du travail que la procédure protectrice des membres du comité d’entreprise s’applique lorsque le salarié a fait la preuve que l’employeur a eu connaissance de l’imminence de sa candidature avant qu’il n’ait été convoqué à l’entretien préalable au licenciement prévu à l’article L. 1232-2 du même code. Le caractère imminent de la candidature n’est pas subordonné à la conclusion préalable d’un protocole préélectoral. Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 19-12.272 F-D
 
CHSCT : les frais d'expertise sont à la charge de l'employeur
L’ensemble des frais nés de la contestation de la décision du CHSCT de recourir à l’expertise, y compris les honoraires d’avocat, incombe à l’employeur, sauf abus. Ces dispositions s’appliquent à l’ensemble des frais exposés par le CHSCT  lors d’une instance engagée postérieurement à l’entrée en vigueur de l’article 31 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et antérieurement à la mise en place du comité social et économique, par  application de l’article 9, V, de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des  responsabilités syndicales. Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 19-13.456 F-D
 
Requalification d'office d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée 
Si, en vertu de l'article 12 du Code de procédure civile la qualification d'un contrat de travail dont la nature juridique est indécise relève de l'office du juge, celui-ci ne peut toutefois, en application de l'article L. 1245-1 du Code du travail, requalifier d'office un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, les dispositions prévues par les articles L. 1242-1 et suivants du Code du travail, relatives au contrat de travail à durée déterminée, ayant été édictées dans un souci de protection du salarié qui peut seul se prévaloir de leur inobservation. Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 18-24.337 F-D
 
Attention au délai entre le prononcé de la mise à pied et la convocation à un entretien préalable à licenciement
Pour dire le licenciement fondé sur une faute grave et rejeter les demandes du salarié, l’arrêt retient que les faits reprochés sont confirmés par la victime dans le cadre de sa plainte et qu’une mise à pied qualifiée de conservatoire dans l’attente de la décision à intervenir sur la mesure de licenciement annoncée dans la lettre de notification de la mise à pied présente bien un caractère conservatoire et non disciplinaire. Enfin, la notification de la mise à pied conservatoire est intervenue le 6 mars 2015, la convocation à entretien préalable à une mesure de licenciement est du 19 mars 2015 et la lettre du licenciement est du 16 avril 2015.
En se déterminant ainsi, alors qu’elle avait constaté qu’un délai de treize jours s’était écoulé entre le prononcé de la mise à pied et la convocation du salarié à un entretien préalable à licenciement et sans relever aucun motif justifiant un tel délai, la cour d’appel a privé sa décision de base légale. Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 18-25.565 F-D
 
 
Licenciement économique=reclassement
La proposition d'une modification du contrat de travail pour motif économique refusée par le salarié ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement et par suite de lui proposer éventuellement le même poste dans l'exécution de cette obligation. Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 19-12.146 F-D
 
 
Atteinte à la liberté fondamentale d’ester en justice : la Cour de cassation veille
La cour d’appel a constaté, sans commettre la dénaturation alléguée, que la lettre de licenciement faisait grief au salarié d’avoir engagé des manoeuvres visant à faire pression sur son employeur et à influer sur la procédure de licenciement engagée en saisissant la juridiction prud’homale d’une procédure de contestation du licenciement qui n’avait même pas été prononcé. Elle en a exactement déduit que ce grief, constitutif d’une atteinte à la liberté fondamentale d’ester en justice, entraînait à lui seul la nullité du licenciement. Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 19-13.593 F-D
 
 
 
Source : Actualités du droit